Les anciens de Baratier

Les anciens de Baratier

2014 au Thor

 

NOUS IRONS TOUS AU PARADIS

 

 

10 mai 2014. Pour fêter avant l'heure le 70e anniversaire des débarquements en Normandie et en Provence, le glorieux régiment des troupes aérochaussées de Baratier, autrefois sous le commandement du général Robert Meissonnier, commémore l'événement à la caserne du Thor, haut lieu de la résistance à l'ennemi. C'est avec une grande émotion que nos vétérans se retrouvent, émotion multipliée par l'occasion qu'ils ont enfin de saluer madame Meissonnier, veuve du général, et madame Rey, veuve de son chef d'état-major.

Après les salutations d'usage, on attend avec inquiétude l'arrivée de l'Yves qui n'est jamais qu'un peu en retard à cause de son épouse, mais surtout de Jean-Claude qui a tourné en rond sur le champ de manœuvres, n'hésitant pas à passer par Carpentras pour venir de Nîmes.

L'apéritif d'honneur est servi sous les ombrages de la caserne et dure le temps qu'il faut, laissant tout loisir aux invités de se donner des nouvelles du front. Après quoi, au signal de la tante-cantinière, tous se dirigent au pas cadencé vers le mess pour y partager un repas dont la qualité se situe bien au-dessus du rata ordinaire du combattant sans grade. Pour l'approvisionnement en gros rouge, c'est le capitaine Michel qui est de corvée et il faut dire qu'il s'acquitte parfaitement de sa tâche de vin. Il sera cité à l'Ordre de la Nation.

Si le repas se déroule dans la meilleure bonne humeur, surtout quand le colonel Victor procède à sa distribution de sirop d'érable, on ne manque cependant pas de remarquer chez la générale une certaine lassitude. Autrefois si loquace et volubile, elle semble ailleurs et ne participe guère aux conversations.

A l'heure du couvre-feu, il faut bien interrompre cette journée mémorable et rentrer dans nos foyers. Pour leur part, les Romieu avaient attendu cette commémoration pour embarquer à destination de l'Ile-Rousse où ils sont assignés à résidence un gros quart de l'année.

C'est là qu'ayant à peine pris leurs quartiers ils apprennent le décès de Ma-Thé qui a sans doute décidé de rendre les armes après cette dernière réunion de l'état-major. Occupés par leurs petits-enfants, ils n'ont pas fait de voyage retour pour assister aux obsèques mais ils étaient quand même là avec toute la famille et tous les amis, comme pour Aimé tout récemment.

 

Ma-Thé, que j'ai connue en 1963 et fréquentée jusqu'à sa fin, sauf les derniers temps parce que Bernadette avait besoin de souffler. Au début, j'étais bien jeune et bien bête, je trouvais qu'elle participait bien peu à la vie de la colo. Un parasite, quoi. Quand on ne connaît pas son histoire... J'ignorais alors que son Robert de mari consacrait tous ses congés à la Sageto d'Or depuis l'an pebre, emmenant avec lui femme et enfants. Et donc madame Meissonnier, couturière de son état, en a cousu des foulards pour les enfants de la troupe, année après année, une campagne chassant l'autre, et elle en versé des larmes à se savoir retenue (enchaînée ?) à Baratier après le Malzieu. Toute une carrière au service du Bon Dieu, des gamins plus ou moins déshérités et des traîne-savates que, dans sa bonté d'âme le Père Jacques nous ramenait régulièrement dans l'espoir de les remettre sur le bon chemin et de bien faire tourner l'institution.

Elle était là, Ma-Thé, toujours et encore là, et elle m'aimait bien. La dernière fois que j'ai vu Robert vivant, j'avais fait une halte au cabanon, histoire de faire souffler mon vélo, et je m'étais résolu à aider Ma-Thé à trier des haricots coco pendant que Robert répondait longuement à un coup de téléphone forcément urgent. Et elle me dit : « Ah ! Mon pauvre Yves, il n'arrête pas de courir, il tient pas en place, il me soûle. » Mais elle était bien heureuse de l'avoir sous la main. Et maintenant qu'elle lui a remis la main dessus (on pense bien à vous deux, là-haut), qu'elle garde bien son Robert en nous attendant tous.

Parce que vous savez, les tamalous sont parmi nous. On apprend que le Victor s'est reposé un moment en bloc opératoire. Et alors, Victor, tu crois être une exception dans notre bande de pieds nickelés ? Regarde Didier, par exemple. Quand il squatte à Robion, avec toi d'ailleurs, je vérifie qu'il a bien pensé à prendre ses pilules pour la tension, le cholestérol, l'arthrose et autres affections (affections, ça veut dire que les maladies nous aiment bien?). J'y pense parce que j'en prends aussi. Allez, que celui qui ne se soigne de rien lève le doigt et je lui dis : « Mon vieux (ou ma vieille, ça marche aussi), nous qui nous soignons, nous savons que nous ne sommes pas dans le meilleur état, mais toi, le malade qui s'ignore, attends-toi à partir le premier. »

Allez, partir pour partir, on vient de prendre nos billets pour le 25 septembre. S'il vous plaît, ne nous annoncez pas de catastrophe pendant notre absence, et s'il faut manger ici ou là, arrangez-vous pour que ce soit avant cette date.

 

Un dernier mot à ceux qui n'ont rien reçu parce que les novis se sont loupés concernant la liste des copains de Papa-Maman à avertir : Stéphane, notre petit dernier de 35 ans, et Aurélie, une fille du Nord, deux fainéants de profs, viennent de convoler en justes noces, leurs alliances étant présentées (très mal) par leur Faustin de fils.

 

Grosses bises à tous, surtout à Bernadette, Régis, Michèle, Chantal, Janique...

 

Christiane et Yves.



03/09/2014
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