Les anciens de Baratier

Les anciens de Baratier

Victor s'envole!

 Avant de vous conter mon expérience qui a peu à voir avec Baratier, c'est suite à une question d'un ancien de Baratier que j'ai pensé à écrire quelques lignes sur mon brevet de pilote. En effet, il se demandait si mon adresse courriel avait été influencée par une proximité ou un lien avec l'aéronautique. Ce à quoi je lui ai répondu qu'il avait le bon flair, puisque cette adresse reprend les initiales de mes trois prénoms (MEV, pour Michel-Émile-Victor), dans le langage bien connu des transmissions parlées. C'est donc devenu mikeechovictor.

  L'ancien de Baratier en question, c'est Gérard Trouchet-Leydier, dit Yves le Loup, qui a été un bien plus grand pilote que moi au vu des appareils qu'il a eu entre les mains, appareils dont il m'a transmis des clichés que je vous présente :

 

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 Je vous laisse apprécier et j'enchaine avec mes histoires.

 

 L'aéroport de Saint-Hubert, situé sur la rive sud de Montréal, a d'abord été un aérodrome avant de devenir, durant la seconde guerre mondiale, une base militaire. Après 1968, le transport civil reprend et plusieurs écoles de pilotages s'y établissent (les toutes premières, dont l'Aéroclub de Montréal, y sont depuis 1927).

 Ayant passé quelques mois à la Baie James, je disposais alors (en 1977) de quelques dollars qui, sans me classer dans les riches, me permettaient d'envisager quelques fantaisies. Et comme j'avais renoué des relations étroites avec ma future épouse, je m'étais mis à échafauder divers scénarios. Dont celui d'obtenir une licence de pilote. Pour me conforter dans le fait du "pourquoi pas moi?", et aussi pour impressionner la belle Josiane.

 Et voilà donc que je m'inscris au cours de pilotage de je ne sais plus quelle école à l'aéroport de Saint-Hubert, réputé pour la grande fréquence de mouvements d'aéronefs qu'on y observe tous les jours. Je pense que c'est l'Aéroclub de Montréal, mais comme je ne sais plus où est mon carnet de vol (j'espère enfoui dans un carton), je n'en suis pas sûr (j'ai retrouvé mon Certificat Solo, c'est bien cette école-là).

  Les cours théoriques, c'est environ trente heures: navigation, météo, communications, contraintes physiques (pas de force centrifuge dans un avion!), règlementation, cartes aéronautiques, etc.

  Mais, ce qui intéresse n'importe quel élève, c'est...le pilotage!

 

  A la première heure de vol, on fait connaissance avec notre instructeur qui va nous diriger et nous suivre durant nos premiers vols. Je tombe sur un jeune Français sympa et je me fie entièrement à lui. Je crois qu'il est important que le maitre sente la confiance de l'élève. L'inverse viendra plus tard quand le maitre aura jugé de la compétence de son élève.

  J'avais trouvé que le Cessna 152 était un peu maigrichon, et j'avais donc choisi de suivre mes cours sur un Cessna 172, un peu plus puissant et plus spacieux avec ses quatre places. Les premières heures sont surtout utilisées pour se familiariser avec l'instrumentation de l'avion, l'utilisation des commandes et la façon de communiquer avec la tour de contrôle. Ainsi que pour les décollages et les atterrissages bien évidemment!

  Chaque fois, c'était une série de "touch and go" (atterrir et décoller). On faisait une boucle sans fin autour de l'aéroport en même temps que cinq ou six autres étudiants, le contrôle ayant bien soin de nous maintenir à une distance sécuritaire les uns des autres.

  Et on recommençait la fois suivante avec un petit rajout de l'instructeur sur, par exemple, une situation de panne de moteur et un atterrissage (fictif!) dans un champ labouré! Bref, toutes, ou presque, les situations dans lesquelles peuvent se retrouver les pilotes de ces petits avions.

  Jusqu'au jour où, revenant de la leçon et nous dirigeant vers notre aire de stationnement, l'instructeur me demande d'arrêter là, sur le bord de la bretelle d'accès. Un peu surpris je m'arrête. L'instructeur me regarde en détachant sa ceinture et me dit : '' C'est à ton tour d'y aller!''. ''Quoi! mais je ne suis pas prêt!''. ''Mais si, je sais que tu es prêt...''.

  Il saute à terre et commence à s'éloigner. Je n'ai vraiment plus le choix, pas question de se dégonfler, ce serait la honte jusqu'à la fin de ma vie. D'un autre côté, je me dis que c'est lui qui sait comment je vais m'en sortir et, apparemment, sa confiance me donne confiance à moi.

  Je le vois s'éloigner et je commence à remettre les gaz pour repartir en même temps que je communique avec la tour de contrôle. Il m'avait bien spécifié de mentionner que c'était mon premier vol solo afin que les contrôleurs me suivent plus attentivement dans mon circuit de quatre ou cinq minutes.

  Au bout de la piste je reçois l'autorisation de décoller et je me lance à la conquête du ciel...

 Tous ceux qui ont appris à piloter se souviennent de ce moment indescriptible que nous vivons lorsque nous sommes tout seul à diriger un avion pour la première fois. On devient le maitre des airs, surpris de l'exploit accompli, l'euphorie nous submerge. Tous les réflexes de l'apprentissage arrivent spontanément et à ce moment-là, on a la poitrine qui se gonfle de satisfaction et de fierté. C'est le triomphe de l'homme sur la machine, et pas n'importe laquelle, la machine volante! L'apothéose !

 Pour moi, l'euphorie a duré jusqu'au lendemain. Je me répétais sans cesse que je l'avais fait et je voulais le dire à tout le monde! Ça y était, j'étais un vrai pilote!

 

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                Écrire sans faire de fautes demande

                     plus d'attention que de voler!

 

 

 Je pouvais donc, par la suite, venir louer un avion pour parfaire mon expérience, sans avoir besoin d'un instructeur. Tout était noté dans mon carnet de vol (que je n'ai toujours pas retrouvé).

 

 

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Cours pilotage été 1979.jpg

 

   Un Cessna 172, rien à voir avec les appareils d'Yves le loup!

 

 

 

 Et puis un beau jour, mon instructeur me mentionne que je dois effectuer ce qu'on appelle un vol-voyage, afin d'obtenir la licence de pilote privé. Un circuit triangulaire où je dois me rendre à Trois-Rivières puis à Québec et retour à St-Hubert. Nous sommes à présent en hiver, et si l'aéroport de Québec est bien dégagé, celui de Trois-Rivières n'a pas les même moyens. Une couche de glace recouvre la piste!

 Bon, je fais mon plan de vol avec les informations météo, je calcule le cap entre chaque ville en fonction du vent, et me voila parti pour la gloire! Un périple d'environ 470 km.

 Arrivé en vue de Trois-Rivières, j'ai un peu d'appréhension. Atterrir sur une piste glacée n'a pas été vraiment un sujet dans mes cours, mais je me dis que je ne dois pas être le premier. Tout se passe bien et j'ai un peu de difficultés à me stationner. Je dois jouer des freins, des gaz et des ailerons pour me mettre dans une position acceptable. On dirait que la couche de glace me nargue et s'amuse de me voir en difficulté...Façon de parler, parce qu'une couche de glace, étant donné que c'est gelé, ça reste de glace!

 J'arrête le moteur, je prends mon carnet de vol et je me dirige vers le bâtiment de l'aérogare où il ne doit pas y avoir grand monde en ce moment de l'année. C'est que je dois faire signer mon carnet afin de confirmer que j'ai bien atterri à Trois-Rivières.

 Et me voila reparti en direction de Québec. A l'époque, je volais à vue, et en arrivant dans cette zone très urbanisée, les yeux fixés sur ma carte de navigation, je finis par ne plus savoir où j'étais. Surmontant ma honte, j'appelle la tour de Québec en donnant ma position approximative : "Qu'est-ce que vous voyez à votre droite?" "continuez, vous êtes dans la bonne direction, l'aéroport va être légèrement à votre droite". Finalement tout s'est bien passé et j'atterris sur je ne sais plus quelle piste (à St-Hubert, c'était la 24 gauche ou la 24 droite) et je me rends à l'endroit qu'on m'avait indiqué au départ, dénommé Bâton Rouge (une école de pilotage me semble-t-il).

 Même procédure de signature puis, après quelques minutes à relaxer, un petit café, je me prépare au retour vers St-Hubert.

 Mon instructeur m'avait recommandé de voler aux alentours de 4000 pieds pour pouvoir admirer le paysage. En hiver c'est pas fameux! Je montais néanmoins à cette altitude et je n'aurai qu'à avoir en vue l'autoroute qui se rendait à Montréal pour ne pas dévier de ma route. Il faisait beau. Entendez par là qu'il faisait soleil mais que le chauffage fonctionnait à fond!

 Je crois que c'est cette chaleur qui a fait que brusquement je réalisais que je commençais à somnoler! Bon sang! tu es dans un avion! me disais-je. Ça m'a réveillé car je n'avais pas l'intention d'aller embrasser le sol. Pas si jeune!

 Finalement, j'arrive en vue des agglomérations et j'appelle la tour de contrôle ''Rappelez quand vous serez à la verticale des lignes à haute tension''. Je rappelle et on me donne les infos météo en me désignant la piste 24 gauche pour atterrir et en me signalant de ne pas m'attarder car d'autres avions s'en viennent.

 

 Une dernière anecdote lors du retour d'un vol local:

La tour de contrôle me dit de rappeler quand je serai au-dessus des lignes à haute tension. Elle m'indique alors comme ci-dessus la 24 gauche. Le problème c'est qu'il y a des "taxiways" de chaque côté des deux pistes, et moi, peut-être un peu distrait, j'atterris sur la 24 droite! Avec un vent de côté qui me pousse sur la partie gazonnée et qui m'oblige à incliner l'avion pour ne pas me faire arriver dans l'herbe. Aussitôt atterri, je vois que la configuration des bâtiments n'est pas celle que j'observe d'habitude sur la 24G! J'appelle la tour: "Je crois que je me suis trompé de piste!" Le contrôleur me répond "Vous inquiétez pas, on s'en était rendu compte!" Sachant que j'étais encore un novice, ils avait choisi de ne pas me stresser pour rien étant donné le peu de trafic à ce moment-là.

 

 

 



25/04/2018
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